La Grande île est touchée par le règlement « zéro déforestation ». Elle exporte essentiellement du café et du cacao sur le Vieux continent. Le règlement est entré en vigueur en 2023. Dans le cadre de la vulgarisation de ce règlement, un dialogue a été organisé par la délégation de l’Union européenne, le 16 janvier 2024, pour la partie malgache.
« Le règlement est aussi une réponse à la volonté du consommateur européen de freiner la déforestation importée et causée principalement par les filières comme le cacao, le café, le soja, le caoutchouc naturel, le bois, l’huile de palme ou encore l’élevage », note la délégation de l’Union européenne à Madagascar. Bleen vous présente les points essentiels à connaitre sur ce règlement qui risque de chambouler pas mal de choses.
C’est quoi le règlement « zéro déforestation » ? Le règlement « zéro déforestation » a été abordé au sein de la commission de l’Union Européenne (UE) en septembre 2022. Il vise à prévenir la mise en marché des produits associés à la déforestation et à la dégradation de la forêt. Plusieurs secteurs sont touchés par cette innovation, dont les chaines d’approvisionnement.
La mise en place des actions en accord pour sa réalisation nécessite une grande adaptation pour les pays concernés. Le règlement interdit la mise sur le marché ou l’exportation depuis le marché européen de produits ayant contribué à la déforestation ou à la dégradation des forêts après le 31 décembre 2020.
Pourquoi ce règlement a-t-il été mis en place ? Depuis plus de 30 ans, la déforestation ne cesse d’augmenter, réduisant considérablement la capacité de stockage de carbone de la planète et participant, par conséquent, à l’augmentation du CO2 dans l’atmsphère. ce qui fait d’elle une des causes majeures du réchauffement climatique. Les forêts sont des puits carbones de premier ordre. D’après les études de la FAO, entre 1990-2020, les pertes de forêt ont été estimées à 420 millions d’hectares, à l’échelle mondiale.
L’Union européenne y joue un rôle primordial puisque la part de l’UE dans la déforestation importée s’élèverait à 36% du total de la déforestation liée au commerce mondial, sur la période 1990-2008. Consciente de cette situation elle a voulu agir. Les produits d’exportation font l’objet principal de la déforestation et l’UE a imposé des règlements pour pouvoir contrôler la déforestation.
Quels sont les enjeux pour Madagascar ? Comme nous l’avons évoqué, la Grande île est un pays exportateur, même si la balance commerciale est encore largement déficitaire. Le commerce extérieur représente 50 % du PIB de Madagascar. Le pays exporte principalement de la vanille (22,2%), du nickel brut (18,4%), des vêtements (9,1%), des minerais de titane (5%), des clous de girofle (4,2%), du cobalt (3,9%), des crustacés (3,4%) et des huiles essentielles. (2,8%). Ses principales importations sont les huiles de pétrole (13,6 %), le riz (6,2 %), les tissus (2,7 %), l’huile de palme (2,6 %), les médicaments (2,5 %) et le sucre (2 %). Le pays exporte aussi du cacao.
C’est ce dernier qui est en jeu pour la partie malgache. Pour les producteurs, notamment pour les petits paysans, la traçabilité et le respect de cette nouvelle norme qui se veut être davantage contraignante seront déterminants pour ne pas être pénalisés. Le règlement « zéro déforestation » est obligatoire pour toute entreprise ou pays exportateur et importateurs de matières premières et de produits dérivés au départ ou à destination de l’Europe.
« L’UE est le premier client de Madagascar. A ce titre, à travers les nombreux produits importés sur le marché européen, elle contribue passivement à la dégradation des forêts. Le nouveau Règlement est aussi une réponse à la volonté du consommateur européen de freiner la déforestation importée et causée principalement par les filières comme le cacao, le café, le soja, le caoutchouc naturel, le bois, l’huile de palme ou encore l’élevage », souligne la délégation de l’Union européenne à Madagascar.
Quels sont les produits et les acteurs concernés ? Le règlement s’applique à sept produits de base (bovins, cacao, café, palmier à huile, caoutchouc, soja et bois) et aux produits qui contiennent ces produits de base, ou qui ont été nourris ou fabriqués à partir de ces derniers.
Concrètement, comment le règlement se manifestera-t-il ? Trois conditions doivent être satisfaites avant que les produits ne puissent être mis sur le marché de l’UE, mis à la disposition sur le marché de l’UE ou exportés à partir du marché de l’UE.
Le cabinet PWC détaille ces conditions. Les produits doivent être « zéro déforestation », c’est-à-dire qu’ils ne contiennent pas de produits provenant de terres ayant fait l’objet de déforestation après le 31 décembre 2020, ou qu’ils n’ont pas été nourris ou fabriqués à partir de tels produits. Pour le cas spécifique des produits qui contiennent du bois ou qui ont été fabriqués avec du bois, les produits « zéro déforestation » sont ceux dont le bois a été récolté sans causer de dégradation des forêts après le 31 décembre 2020.
Ils sont produits dans le respect de la législation pertinente du pays de production, qui englobe non seulement les législations environnementales, fiscales et sociales mais également les règles de protection des droits de l’homme et des peuples autochtones.
Ils font l’objet d’une déclaration de diligence raisonnée de la part des opérateurs et des commerçants, qui doivent garantir que les produits qu’ils commercialisent ne sont pas issus de la déforestation. La diligence raisonnée est une nouvelle obligation que les opérateurs et metteurs sur le marché doivent intégrer dans leurs process.
Avec Mirindra Randrianarisoa