L’exploitation minière artisanale et à petite échelle de l’or contribue à hauteur de cinq millions de dollars dans l’économie du pays. Environ 600 000 personnes en sont directement touchées.
Les activités minières aurifères jouent un rôle majeur dans la dégradation généralisée de l’environnement à Madagascar. Ce, dans la mesure où pour extraire ce métal très convoité, les hommes passent par la déforestation, la dégradation du sol, la destruction des zones humides et n’hésitent pas à polluer les zones d’extraction. La perte en biodiversité est telle que les acteurs œuvrant dans le domaine de la conservation ne cessent d’interpeller les autorités compétentes à agir.
Un véritable danger public
Ne se limitant pas à ces pratiques nuisibles, les orpailleurs utilisent également le mercure dans le procédé d’extraction de l’or, malgré l’interdiction formelle des lois et règlements en vigueur. Dans la Grande île, « 18 tonnes de mercure sont utilisées annuellement dans l’Exploitation minière artisanale et à petite échelle de l’or (EMAPE) », selon les estimations du ministère de l’Environnement et du Développement durable. Les données de ce département ministériel font également savoir que l’EMAPE touche directement 600 000 personnes réparties dans douze ou quatorze sites miniers dans tout le territoire national.
Le mercure est connu pour ses conséquences néfastes sur la santé. Un point soulevé par Arinjaka Andriamiarisoa, ancien directeur général du Développement durable auprès du MEDD. « Les effets négatifs de l’utilisation du mercure dans les procédés d’orpaillage artisanal sont déjà constatés. Il y a des décès, il y a d’autres conséquences néfastes sur la santé publique, surtout des orpailleurs alors qu’ils travaillent dans ces mines dans l’optique d’un avenir meilleur », note-t-il. Le cancer est l’une des conséquences graves de l’utilisation du mercure dans ces procédés. Les problématiques ne se limiteraient pas uniquement aux conséquences sur la santé des orpailleurs. « D’autres secteurs d’activités telles que l’agriculture et l’élevage en sont également victimes » interpelle Arinjaka Andriamiarisoa. Dans le procédé d’extraction, des molécules de mercures sont déversés dans le sol et les rivières. Certaines d’entre elles peuvent atteindre les nappes phréatiques et polluer les sources d’eau. Les méfaits du mercure sur les plantes et les animaux quant à eux ne sont pas suffisamment discutés et communiqués.

Une lutte qui date
Madagascar fait partie des 118 pays qui ont ratifié la convention de Minamata sur le mercure. Des textes qui rentrent dans le cadre de la mise en œuvre de la convention existent dans le pays et sont, en principe, appliqués dans toute l’étendue du territoire. L’on peut ainsi parler du décret N° 2018-1145 portant interdiction de l’importation et règlementation de l’exportation des déchets, des déchets dangereux, des substances dangereuses et des matériels en contenant à Madagascar.
Cet instrument a pour « objet d’interdire le dépôt, l’abandon, l’introduction dans le territoire de Madagascar des déchets, des déchets dangereux et des substances dangereuses venant de l’étranger ainsi que leur exportation » dans le pays. Dans l’annexe trois de ce décret figure les matériels contenant du mercure qui sont prohibés. A ce décret s’ajoute la note ministérielle sur l’approvisionnement des matériels et instruments sans mercure dans les activités de soins publics et privés à Madagascar. Ce texte, qui est le fruit d’un partenariat entre le ministère de la Santé publique et celui de l’Environnement et du Développement durable, interdit l’utilisation des matériels et équipements comme le tensiomètre et le thermomètre fonctionnant avec du mercure. Des initiatives ont également été menées afin de renforcer ces démarches. La mise en place du comité national de la mise en œuvre de la convention, l’inventaire des produits contenant des mercures à Madagascar ou encore l’inventaire des sources de rejet de mercure dans l’environnement en sont des exemples.

De Gold + à Planet Gold Madagascar
Le lancement officiel du projet Planet Glod Madagascar le 14 mars 2024 entend relever le défi « de limiter à six (6) tonnes l’utilisation du mercure dans le processus d’extraction de l’or ». Le projet a été initié depuis des années et avait été baptisé Gold + avant de finalement porter l’intitulé de Planet Gold Madagascar. L’élaboration de son document PRODOC a d’ailleurs été initié en 2021. Planet Gold Madagascar est financé à hauteur de cinq millions de dollars par le Fonds pour l’Environnement mondial et est mis en œuvre par le MEDD en partenariat avec l’ONUDI, le ministère des Mines et des Ressources stratégiques et la Conservation international. Le projet consiste à améliorer la formalisation de l’exploitation minière artisanale et à petite échelle de l’or dans quatre sites miniers : Andrafialava, Diana, Antanimbary, Betsiboka, Ambalamanasy, Vatovavy et Farezy, Atsimo-Andrefana. Dans la mesure où « la plupart des Exploitations exploitations minières artisanales et à petite échelle de l’or se font dans l’informel» .
Leur formalisation permettra de faire accéder les petits orpailleurs dans le circuit formel et d’avoir un registre à jour, « une base des données des acteurs du secteur, du moins dans les quatre sites », indique-t-on. Ce qui constituera « un moyen efficace d’améliorer les recettes fiscales, et par ricochet de renflouer les caisses de l’Etat ». De l’autre, l’objectif consiste à « briser les chaines d’approvisionnements de mercure » qui « se font dans le noir » si l’on se fie aux dires de l’ancien directeur général de l’Environnement et du Développement Durable. Pour l’heure, l’utilisation du mercure dans le procédé d’extraction de l’or continue « dans les 12 à 13 sites aurifères identifiés à Madagascar ». Avec les menaces que cela peut représenter.