L’Afrique et le fric

Et ce qui devait arriver arriva. Le président américain Donald Trump a dégainé l’arme qu’il a brandie dès sa prise de fonction et durant sa campagne : les tarifs douaniers pour "protéger" l'économie américaine et pour punir les autres pays "méchants".

Le fait est historique : Washington n’avait jamais érigé de telles barrières douanières depuis les années 1930. L’administration Trump s’est attaquée, un à un, au cas de chaque pays sur la base de calculs sans « assise scientifique », comme le font observer les analystes.

Le contre-attaque, comme aime le rappeler le locataire de la Maison Blanche, est massive. 34 % de droits de douane sur les importations chinoises (s’ajoutant aux 20 % déjà imposés depuis janvier), 20 % sur celles en provenance de l’Union européenne (UE), 32 % sur Taïwan et 24 % sur le Japon. Pour toute la planète, une ponction minimale de 10 % est infligée.

La Grande île n’est pas épargnée : selon le décret signé par Donald Trump, le taux devrait augmenter jusqu’à 47% pour les produits provenant de Madagascar. Les répercussions sur le pays devraient se faire ressentir assez rapidement. Les principales exportations de Madagascar vers les États-Unis comprennent principalement l’habillement, la vanille, le titane, le cobalt et le nickel, qui représentent ensemble environ 15 % des exportations totales du pays. Les États-Unis se classent au deuxième rang des principaux marchés d’exportation de Madagascar, le total des échanges de biens entre les deux nations atteignant 786,6 millions de dollars en 2024. A travers l’AGOA, des milliers de travailleurs officient dans des entreprises franches, notamment dans le secteur textile, et vivent (ou survivent) grâce au salaire octroyé. La monnaie nationale ne coule pas également grâce à ces maigres exportations salvatrices. Oui c’est un coup dur pour le pays.

Depuis près d’une décennie, la tendance au repli sur soi en Occident et l’émergence de l’extrême-droite présageaient une telle décision, non seulement aux Etats-Unis mais aussi ailleurs. Dans un monde globalisé qu’ils avaient contribué à créer, au nom du libre-marché, ce sont les pays en développement qui vont payer un lourd tribut, même si les contre-coup économiques sur leurs consommateurs se feront ressentir, il n’y a aucun doute.

Pour le cas de Madagascar, il est temps de regarder ailleurs. Nos voisins les plus proches sont l’océan Indien et le continent africain. Le potentiel inexploité d’exportation de l’Afrique est estimé à 21,9 milliards de dollars, soit 43% des exportations intra-africaines. Certains poncifs gravés dans nos mémoires et entretenus par un racisme primaire nous font percevoir une image rétrograde de l’Afrique.

Mais le continent n’est pas que pauvreté et misère, c’est une diversité de marché incomparable capable d’absorber quasiment toutes nos exportations, c’est un marché intérieur de plus d’un milliard de consommateurs, ce sont des géants économiques et une population jeune et un marché unique, la ZLECAF, prometteur.

Si l’occident nous tourne le dos, nous devons agir en gentlemen en ne leur rendant pas la pareille, mais en diversifiant nos débouchés et nos destinations d’exportation. Il est temps de regarder ailleurs, de se réconcilier avec notre passé.

En Occident, nous avons affaire – et nous aurons affaire – à des gouvernants égoïstes, patriotes diront les autres, qui ne pensent qu’à leurs électorats et qui se nourrissent d’une haine viscérale de l’autre, l’Afrique ne doit pas tomber dans le piège mais, au contraire, montrer des signes de solidarité et d’entraide.

Raoto Andriamanambe

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